Abbe J-S

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samedi 3 janvier 2015

Homélie du 30 juin 2014 - Mémoire des Protomartyrs romains

Aujourd'hui, au lendemain de la Solennité de Saint-Pierre et Saint-Paul, l’Église notre sainte Mère célèbre la Mémoire des Protomartyrs de la Ville éternelle. En fidèles disciples, ils ont, avec le Prince des Apôtres et le Docteur des Nations, glorifié Dieu en offrant leurs vies d'une manière particulièrement héroïque.
Un jour, un ambassadeur auprès du Saint-Siège demanda quelques reliques de saints au Pape saint Pie V, le Pape lui remit tout simplement un peu de terre recueillie devant la Basilique vaticane. L'ambassadeur crut que le Pape s'était moqué de lui et s'en plaignit, mais le saint Pontife lui montra la terre, alors miraculeusement teinte d'un sang vermeil.
Quand nous allons à Rome, en tant que pèlerins – cela m'est arrivé déjà plusieurs fois – nous ne pouvons oublier d'aller à la Basilique Saint-Pierre et prier devant le tombeau de l'Apôtre. Mais lorsque nous nous recueillions devant l'autel de la Confession et prions pour le Pape et notre Église, pensons-nous que le sol qui nous soutient est aussi consacré par le sang de tous ces martyrs dont nous ignorons le nom ?
Quand, en 1626, sous le pontificat du Pape Urbain VIII, on creusa les fondements du baldaquin de bronze qui maintenant recouvre l'autel de la Confession de Saint-Pierre, on trouva de nombreux tombeaux, dont une grande partie contenaient des ossements calcinés mêlés à de la cendre et à des charbons. On pensa immédiatement aux martyrs brûlés par Néron dans son Cirque. Nous pouvons lire dans le récit de Tacite qui nous relate comment les chrétiens de Rome furent accusés comme responsables de l'incendie de la Ville par le Tyran qui fut lui-même l'auteur de ce drame, et furent atrocement exterminés par ce dernier : « On ne se contenta pas de les faire périr, écrivit l'historien romain, on se fit un jeu de les revêtir de peaux de bêtes pour qu’ils fussent déchirés par la dent des chiens, ou bien ils étaient attachés à des croix et enduits de matières inflammables, quand le jour avait fui, ils éclairaient les ténèbres comme des torches… » Cette scène, nous pouvons encore la contempler dans la magnifique toile de Henryk Siemiradzki, intitulée Les torches de Néron.
« Ils éclairaient les ténèbres comme des torches » ; en écrivant cela, Tacite révéla, sans doute inconsciemment, le sens profond de la Martyre de ces chrétiens, il prophétisa, en quelque sorte, comme le grand prêtre Caïphe quand il disait, lors de la condamnation de Jésus : « Il est préférable qu'un homme meure plutôt que la nation tout entière ».
« La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue » (Jn 1, 5) ; et pourtant, il y eut des hommes et des femmes qui furent touchés par cette lumière, et ils ne voulurent pas qu'elle soit engloutie par les ténèbres, alors ils se transformèrent en charbons, ils se consumèrent, afin que la lumière persiste, afin que la lumière grandisse, jusqu'à ce que la lumière triomphe, jusqu'à ce que toutes les ténèbres soient absorbées par cette lumière.
Telle est la vocation de ces martyrs, telle est la vocation de tous les martyrs chrétiens.
Les martyrs de l'an 64 furent littéralement les témoins de la Lumière du Christ Jésus, leur unique Maître ; et par leur foi, ils ont transformé le spectacle de la cruauté du Tyran en un drame sacré, une louange incomparable à la Sainte Croix.
« Le Sang des martyrs est la semence des chrétiens », nous dit Tertullien. Nous sommes donc la descendance de ces glorieux martyrs, et nous sommes, nous aussi, appelés à être des témoins de cette même lumière, en offrant notre vie, chacun et chacune dans sa vocation propre.

Que ces glorieux martyrs intercèdent pour nous, amen.

(Ce sermon a été prononcé le lendemain de mon ordination diaconale.)

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