Abbe J-S

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dimanche 25 janvier 2015

Homélie pour la fin de la semaine de prière pour l'unité des chrétiens (25 janvier 2015)

« Donne-moi à boire », dit Jésus à la femme samaritaine.
À cet instant-là, cette femme surprise, voire troublée par une telle demande aussi brusque que inattendue, qu’est-ce qu’elle voit ? Elle voit sous le soleil brûlant un homme assis à côté du puits, épuisé et affamé, accablé par la fatigue et tourmenté par la chaleur insupportable du midi, un homme totalement exposé dans sa vulnérabilité, dans sa fragilité, et qui la regarde avec insistance.
En cet homme-là, elle reconnaîtra, dans quelques instants, le Messie, le Sauveur du monde, le Sauveur qu’elle-même a tant désiré et attendu.
Augustin d’Hippone, le très grand penseur chrétien et philosophe, en commentant ce passage de l’Évangile dans un sermon, il dit : Jésus qui est « la force même », est présentement « faible » ; il est fort, car il est la Parole créatrice de Dieu – au commencement était le Verbe, par Lui tout a été fait et rien n’a été fait sans lui ; mais il est faible, car – le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous. La force du Christ nous a créés, la faiblesse du Christ nous a recréés ; « la force du Christ a donné l’existence à ce qui n’était pas, la faiblesse du Christ a préservé de la mort ce qui était ; il nous a créés par sa force, il nous a recherchés par sa faiblesse ».
« Donne-moi à boire », dans cette voix assoiffée, nous entendons peut-être quelques faibles échos des pleurs de l’Enfant de Bethléem qui agitait dans la pauvre mangeoire, ou nous entendons peut-être aussi, de loin, la voix de l’homme de douleur, suspendu sur la Croix qui dit : «  j’ai soif ».
Mais qu’est-ce que cette soif de Jésus ? Cette soif si ardente, sinon la soif de notre soif.
Oui, Jésus a soif de notre soif, et en nous montrant sa soif, il veut éveiller la nôtre, la vraie soif profonde qui se cache en nous ; il veut nous entendre dire enfin : donne-nous ton eau qui deviendra en nous une source d’eau vive, et qu’elle étanche notre soif pour l’éternité !
Mais connaissons-nous cette soif ? Cette soif si vive mais bien souvent insensible, qui se déguise en une multitude de désirs, mais qui nous ronge à l’intérieur et qui creuse en nous un vide toujours plus grand ? Ou bien, sachions nous que en chacun il y a cette femme samaritaine, qui vit en usant sa liberté comme un enfant insolent traite capricieusement ses jouets, mais qui, ayant peur du regard des autres, s’enferme dans sa solitude, et s’expose seule sous le soleil hostile, et s’épuise jour après jour sur un chemin qui ne finit pas, en cherchant cette eau qui ne peut apaiser sa soif que pour un instant.
Mais entendons-nous cette voix qui vibre en nous et nous demande : donne-moi à boire ? Voyons-nous ce regard, ce regard comme ce puits au lueur profonde qui sans violence aucune, pénètre en nous en faisant taire la honte dont depuis si longtemps nous sommes captifs.

Oui, il est là, ici et maintenant et il nous demande humblement : donne-moi à boire. Et si nous sommes aujourd’hui ici réunis, n’est-ce pas pour nous offrir tout simplement à son regard, et lui répondre chacun en son nom : mais donne-moi ton eau, qu’elle devienne en moi la fontaine d’eau vive.

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