Abbe J-S

Abbe J-S

dimanche 27 janvier 2019

Méditation du 27 janvier 2019

Méditation du dimanche 27 janvier 2019

« L’Esprit du Seigneur est sur moi » : cette parole du Prophète Isaïe prononcée par la bouche Jésus porte à ce jour une signification particulière. C’était au bord du Jourdain, lorsque, ayant été baptisé, Jésus sortait de l’eau, et la voix du Père se faisait entendre avec ces mots : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve toute ma joie », alors l’Esprit-Saint descendait sur Jésus sous la forme d’une colombe. Qu’est-ce que l’Esprit-Saint ? C’est l’amour infiniment paternel de Dieu dont son Fils unique est rempli. Aujourd’hui, en déclarant publiquement : « L’Esprit du Seigneur est sur moi », Jésus se révèle comme « Fils » : je suis le Fils, puisque l’Amour du Père réside pleinement en moi. Et il poursuit : « parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction », et « Il m’a envoyé ». Si le Père m’a rempli de son amour, s’il m’a consacré par la noblesse de la filiation divine, c’est pour m’envoyer, c’est pour que je sois son Apôtre : puisque le propre du Fils c’est faire la volonté du Père, c’est obéir affectueusement toute parole venue du Père ; c’est pour cette raison que je suis venu dans le monde, je suis venu vers vous : je suis là pour faire la volonté de mon Père. 

Et si le Fils est l’Apôtre du Père : c’est-à-dire son Envoyé, quel est sa mission ? Alors Jésus continue encore avec les paroles d’Isaïe : « Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés ».

Et maintenant, nous pouvons comprendre à deux manières cette annonce de Jésus. D’abord, nous pouvons entendre cette parole comme une auto déclaration faite uniquement à ses contemporains : vous attendez le Messie annoncé par la Loi et les Prophètes ? Je le suis, avec moi, la parole prophétique est totalement accomplie. Et nous savons que dans tous les récits évangéliques, les paroles de Jésus sont toujours accompagnés par les actes miraculeux qui créditaient ses paroles : Il va multiplier cinq pains pour nourrir une foule immense, il va guérir les paralysés, ouvrir les yeux des aveugles, purifier les lépreux, et même relever les morts. Nombreux sont ses contemporains qui vont découvrir en lui le Messie annoncé. Et pourtant, si notre lecture s’arrête là, l’arrivée de Jésus reste pour nous un événement historique et lointain. C’est peut-être édifiant pour nous de le savoir, et nous ne sommes pas vraiment concernés par cet événement. 
Mais nous pouvons aussi comprendre autrement cette annonce de Jésus, c’est-à-dire : par cette parole, nous pouvons découvrir dans l’avènement de Jésus un bouleversement profond de l’histoire humaine – le Fils de Dieu est venu pour arracher l’humanité tout entière à l’abîme de sa misère, et l’élever vers un horizon nouveau : il est donc le Rédempteur, non pas pour un petit groupe choisi, mais pour tout le genre humain, et il a changé définitivement le cours de l’histoire. Si telle est notre lecture de cet évangile, alors le Fils de Dieu est venu aussi pour nous, et la Parole bienfaisante de Dieu s’accomplira également pour nous aujourd’hui. 

Est-ce qu’il est vrai que le Fils est venu aussi pour nous ? Admettons que son avènement est encore actuel aujourd’hui, l’objet de cette venue est pourtant toujours bien précis : il est venue pour les pauvres, les captifs, les aveugles, les opprimés. Les sommes nous ? Si nous ne sommes pas ces miséreux, encore une fois, nous ne sommes pas concernés par son arrivée, puisque nous n’avons pas besoin d’être sauvés, nous nous contentons de notre existence. Mais si en réalité il est venu aussi pour nous, aujourd’hui, ici et maintenant, c’est-à-dire : nous avons besoin de lui, ce Sauveur, pour être guéris, relevés, libérés. 

Alors, il y a donc une question fondamentale pour nous : avons-nous besoin d’être sauvés ? Avons-nous besoin d’un Sauveur ?

Nous vivons dans un monde où tout signe de faiblesse exposé est un scandale. On idolâtre la performance, on s’oblige à être fort, rapide, efficace, on se protège par une belle apparence souvent artificielle. Et nous devons surtout cacher nos misères, nos fragilités, nos pauvretés, nos limites. Il est même indécents de s’intéresser à la faiblesse de l’autre : on se débrouille, on y croit et on éduque ainsi nos enfants et nos jeunes.

Mais la foi chrétienne honore la fragilité, honore la pauvreté. Pour un chrétien, ses limites ne sont ni honteuses ni pesantes, mais elles nous donnent une ouverture : une ouverture à l’amour, au Tout-puissant, à l’infini. 

En effet, qui sont les pauvres ? Il n’y a pas seulement ceux qui vivent dans une précarité matérielle, mais aussi tous ceux qui cherchent la vie, la vie véritable, la vie en plénitude, alors rien de ce monde ne peut les rassasier, rien de fugitif ne peut les satisfaire, mais seulement la vie de Dieu peut les combler. Et qui sont les captifs ? Il n’y a pas seulement ceux qui sont physiquement enchaînés, enfermés, isolés, mais aussi tous ceux qui sont désireux d’une liberté authentique, du corps et de l’âme, une liberté vivifiante et élévatrice, seul le Ciel peut leur accorder. Et qui sont les aveugles ? Il n’y a pas seulement ceux qui souffrent de la cécité du corps, mais aussi tous ceux qui, malgré les illusions fiévreuses et changeantes de ce monde et les brouillards épais du mensonge, quêtent inlassablement la Vérité, l’unique Vérité, seule la lumière divine peut les éclairer. Enfin, qui sont les opprimés ? Il n’y a pas seulement les persécutés et les exploités des systèmes économiques ou politiques, mais aussi tous ceux qui, malgré les désenchantements répétitifs d’ici-bas, ont toujours faim et soif d’une justice vraiment noble, inconditionnelle, inébranlable, qui n’appartient qu’au Royaume des Cieux.

Oui, le Christ Jésus vient, il vient à nous aujourd’hui pour nous donner la Vie de Dieu, le salut éternel. Mais il ne pourrait jamais mettre une seule petite goutte d’eau dans un verre déjà rempli. Qu’est-ce que le don de Dieu ? Qu’est-ce que le salut en Jésus Christ ? Nous le saurons, lorsque nous aurons dégagé de nos cœurs toute suffisance et toute illusion. 

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