Dans
la première lecture de ce dimanche, Job nous a fait entendre cette
triste affirmation : « Vraiment, la vie de l'homme sur la
terre est une corvée » ; il est surprenant, il est
peut-être même injurieux qu'une telle parole nous l'avons attribuée
à Dieu, et nous avons même rendu grâce pour elle. Est-ce vraiment
que la vie de l'homme sur la terre n'est qu'une corvée ? Et
quelle corvée ? Job nous dit ceci : « Comme
l'esclave qui désire un peu d'ombre, comme le manœuvre qui attend
sa paye, […] (mais) je n'ai en partage que le néant » ;
cette lamentation de Job nous fait voir le vrai malheur
de cette corvée : si l'homme n’œuvre que pour lui-même,
s'il n'a pour l'objet qu'une consolation éphémère et une
rétribution imminente, il n'obtiendrait rien que le néant, et il ne
serait jamais comblé, satisfait ; et toute sa peine, ne
certifie que davantage le vide sans fond qui l'habite. Et si notre
vie n'est que cela, est-elle vraiment un don de Dieu ?
Or,
dans la deuxième lecture, l'apôtre Paul, en décrivant son
engagement dans la mission, nous illustre une autre possibilité de
notre vie actuelle. Cette vie est en effet aussi laborieuse, puisque
Paul dit : « libre à l'égard de tous, je me suis fait
l'esclave de tous ». Et pourtant, cet esclavage que Paul
lui-même a choisi ne vise aucunement un gain à son intérêt
personnel, mais il a pour but de « gagner le plus grand nombre
possible » d'hommes – non pour lui Paul, mais pour l’Évangile
de Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour que cet Évangile soit annoncé
à tous, qu'il gagne le cœur de tous. Et même s'il ne pouvait
gagner que « quelques uns », peu importe, pour ces
quelques uns, « à tout prix », il se fera « tout à
tous ». Et cet engagement, que lui-même a qualifié de
l’esclavage, n'est point pour lui une infortune, le malheur est
plutôt le contraire : « Malheur à moi si je n'annonçais
pas l’Évangile ! » dit l'Apôtre.
Nous
voyons que Job pris dans sa peine, pour lui, sa vie n'est qu'une
corvée ; et Paul labourait dans le champ du Seigneur, mais pour
lui son malheur c'est surtout être séparé de son ouvrage. En
comparant ces deux témoignages, nous pouvons comprendre que ce
qui décide si notre vie est heureuse ou malheureuse, ce n'est pas
tant la pesanteur qu'elle porte, mais plutôt l'horizon qu'elle vise.
La
vie de Paul est laborieuse mais heureuse, puisque cette vie est
entièrement un don offert à Dieu pour son œuvre dans le service
des autres.
Offrir
sa vie à Dieu, c'est la noble vocation de tout homme. Saint Ignace
de Loyola nous dit : « L’homme
est créé pour louer, respecter et servir Dieu Notre-Seigneur ».
Puisque nous sommes créés pour Dieu, pour sa gloire et pour
participer à sa gloire, notre vie ne se réalise que en tant que
offrande faite à Dieu. Cette offrande peut se réaliser dans une vie
formellement consacrée, comme la vie religieuse ou la vie
sacerdotale qui porte en soi un signe visible du Royaume de Dieu dans
le monde présent ; elle peut aussi se réaliser dans la vie de
tout homme et de toute femme, dans la vie familiale, dans la vie
professionnelle, en tant que époux ou épouse, en tant parent ou
enfant, en tant employé ou employeur. Le même saint Paul nous
enseigne ainsi dans sa lettre aux colossiens : « tout ce que
vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du
Seigneur Jésus, en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le
Père » (Col 3,17).
Et
une vie offerte à Dieu s'oriente nécessairement vers le service des
autres. Puisque, si nous osons libérer en nous le don de
Dieu qui est l'amour gratuit que nous avons reçu dans le sacrifice
de Notre-Seigneur, il deviendra un élan puissant qui nous poussera à
dépasser notre égoïsme, et nous nous inclinerons dans la joie pour
laver les pieds de nos frères comme Notre-Seigneur Jésus-Christ, et
comme l'Apôtre Paul, nous serons fiers d'être esclaves de tous.
Chers
amis, c'est à nous de choisir si notre vie est une corvée ou un
bonheur, choisissons le chemin du bonheur, il nous mènera vers le
Seigneur.
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