Nous avançons dans l'année sainte de la Miséricorde, et voilà l’Évangile de cet onzième dimanche du Temps Ordinaire nous donne un enseignement admirablement profond sur la Miséricorde de Dieu ; et surtout, il nous illustre ce qu'est « accueillir la Miséricorde de Dieu ».
Saint
Luc, l'écrivain le plus sublime des quatre évangélistes, nous met
devant une scène extraordinaire : dans la maison d'un notable
pharisien nommé Simon, lors d'un festin auquel Jésus était convié
en qualité de Rabbi ; survint alors une femme, une pécheresse
reconnue ; et, entrant dans la salle, elle se mit directement
derrière Jésus, et elle couvrit les pieds de ce dernier du parfum
précieux et de ses baisers, et elle les essuya de ses chevaux. Ces
gestes plus que osés, nous pouvons les qualifier de « gestes
affectueux », pour ne pas dire sensuels. Et ces gestes ont été
posés publiquement, mais devant quel public ! Les pharisiens,
les personnes religieuses et vertueuses, ceux qui incarnent l’observance
stricte de la loi Mosaïque et qui orientent les opinions de publiques. Et
évidemment, à cet instant, tous les regards sont fixés sur Jésus,
et nous savons que si personne n'avait empêché l'entreprise de
cette pécheresse, c'est parce que ces notables qui étaient présents
voulaient savoir ce qui allait se produire, et comment Jésus allait
réagir.
Nous
connaissons ce qu'est la réaction de Jésus, son attitude
libératrice et salutaire à l'égard de cette femme, mais revenons
sur elle : qu'est-ce qui l'a poussée à faire cette folie ?
D'où vient son audace surprenante ?
Sans
doute, elle a déjà entendu parler de Jésus : ce Jésus qui en
traversant la terre de Galilée et de Judée annonce l'arrivée du
Royaume de Dieu et enseigne la conversion à tous ; ce Jésus
qui guérit les malades, relève les infirmes, chasse les esprits
mauvais et en libère les captifs ; et surtout ce Jésus qui est
un rabbi, non pas comme les autres, mais il ose toucher ceux qui
étaient intouchables, fréquenter ceux qui n'étaient pas
fréquentables, et il va vers ceux ont été rejetés, exclus, et il
les fait revenir sur le chemin vers Dieu en leur donnant le pardon.
Elle
qui était intouchable, infréquentable, rejetée et exclue, en
apprenant l'arrivée d'un tel Maître, elle y vois son Messie et son
cœur éteint s'allume par une espérance nouvelle, et elle a décidé
d'aller à sa rencontre.
Mais
si en entrant dans la maison de Simon, elle a pu repérer aussitôt
celui que son cœur cherchait, très probablement, elle connaissait
déjà le visage de Jésus. Peut-être, elle l'a déjà aperçu de
loin en se dissimulant parmi la foule qui le suivait. Peut-être
elle-même l'a déjà suivi depuis quelques jours. Nous ne pouvons
pas savoir ce qu'elle a vu, mais une chose est certaine :
l'ayant vu de ses yeux, ce qu'elle avait entendu auparavant a été
confirmé ; et bien plus, le visage de Jésus lui a donné cette
certitude que, bien avant être pardonnée, elle était déjà aimée
– elle a cette certitude d'être aimée de ce rabbi, en qui Dieu
est présent, alors elle a décidé de répondre à cet amour
immérité et inespéré par l'expression de son propre amour, elle a
décidé de lui dire son amour par ses gestes : ses gestes
audacieux mais humbles et sincères, ses affectueux, amoureux mais
profondément chastes et purs, ses gestes silencieux mais qui font
entendre le cri de son cœur.
Cette
femme n'a pas demandé le pardon, mais en accueillant l'amour divin,
elle est déjà pardonnée ; elle n'a pas demandé le salut,
mais en manifestant son amour, elle est déjà sauvée ; elle
est à présent fondue en larmes, mais de ses larmes jaillissent déjà
les rayons de la joie ; elle s'est prosternée aux pieds de son
Sauveur, mais dorénavant elle est relevée par les mains de Dieu.
Cette
femme a vécu une véritable expérience de la Miséricorde de Dieu.
La Miséricorde de Dieu n'est pas une pitié hautaine et
impersonnelle qui nous est donnée avec mépris ou condescendance,
mais elle est ce sans quoi notre vie perd de sens et tombe en ruine ;
elle est toujours là à portée de nos mains, elle nous précède et
nous environne, elle frappe sur la porte de notre cœur en voulant
être accueillie.
Le
Pape Benoît XVI dit : « Seulement
là où on voit Dieu commence véritablement la vie. Seulement
lorsque nous rencontrons dans le Christ le Dieu vivant, nous
connaissons ce qu’est la vie. Nous ne sommes pas le produit
accidentel et dépourvu de sens de l’évolution. Chacun de nous est
le fruit d’une pensée de Dieu. Chacun de nous est voulu, chacun
est aimé, chacun est nécessaire ».
Cet amour qui nous précède et donne sens à notre vie est le cœur
même de la Miséricorde de Dieu. Et le don de cette Miséricorde se
renouvelle encore aujourd'hui, puisqu'elle se fait chair dans le
Corps du Christ, elle est présente dans l'Eucharistie.
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