« Marie-Madeleine
se rend au tombeau de grand matin, c'était encore les ténèbres ».
Depuis
le jour de la sainte Passion, l'obscurité qui enveloppa le monde
sembla inébranlable. Et c'est dans cette obscurité régnante, que
Marie-Madeleine avançait en allant vers celui que son cœur aimait.
Elle allait vers lui, vers celui qui l'a sauvée en brisant les
chaînes de honte qui l'avaient rendue esclave, celui qui l'a revêtue
d'innocence et d'une beauté toute nouvelle – la beauté de fille
de Dieu ; elle allait vers lui, qui était non seulement son
libérateur mais aussi son ami, son Maître, son Seigneur, en qui
s'incarnait la Parole de vie et le véritable sens de son existence.
Mais
elle avançait dans les ténèbres : le soleil pouvait-il encore
se lever, si la lumière de toutes lumières était déjà engloutie
par la nuit de la mort ?
Marie-Madeleine
marchait dans les ténèbres. Mais elle ne fut pas la seule
prisonnière de cette nuit interminable. Les apôtres qui n'ayant
rien compris de la sainte Écriture ni les enseignements du Seigneur,
s'étaient réfugiés derrière la porte verrouillée de Cénacle, là
où la nuit de la tristesse se prolongea, s'obscurcit et s'alourdit
par les doutes et la peur grandissante.
La
nuit semble indéfiniment installée, son règne semble irréversible.
Mais c'est justement au cœur de cette nuit même que le vrai
Vainqueur s'est levé d'entre les morts.
« J'avais
dit: les ténèbres m'écrasent ! mais la nuit devient lumière
autour de moi. Même la ténèbre pour toi n'est pas ténèbre, et la
nuit comme le jour est lumière ! »
Ces mots du psaume 138e
semblent vouloir bien illustrer ce qui s'est produit dans la nuit de
la résurrection : du tombeau sort le soleil invincible, en Lui
la nuit se transfigure en lumière.
Dans
la sainte Écriture, la nuit est bien souvent cette scène
mystérieuse sur laquelle se déroulent les œuvres les plus
éclatantes de Dieu. C'était durant une nuit bien longue que le
déluge inaugura une ère nouvelle ; c'était également durant
une nuit particulièrement intense que la Mer Rouge fut divisée afin
que les fils d'Israël pussent traverser à pieds secs et poursuivre
leur chemin de libération ; c'était dans la nuit la plus
douce, que le divin Enfant naquit à Bethléem, comme une lumière se
leva au sein des ténèbres ; et c'est également dans une nuit
bénie et sanctifiée, que le Christ est ressuscité, et par sa mort
Il a détruit la mort.
Marchant
dans les ténèbres, les amis Jésus, accablés par la tristesse et
les questionnements cherchèrent le corps de leur Maître meurtri,
sur lequel ils pouvaient pleurer et lamenter. Mais ils ne trouveront
que le tombeau vide, l’œuvre de la méchanceté n'est plus, le
Seigneur n'est pas prisonnier du tombeau, Il est vivant.
Dans
le tombeau vide, est née la foi en Ressuscité.
Frères
et sœurs, ne sommes nous pas, nous aussi, les disciples marchant sur
un chemin obscur ? En voyant les spectacles de la barbarie se
produire devant nos yeux l'un après l'autre avec une férocité
toujours plus fracassante, en voyant la terre que nous avons reçu de
la main du Créateur se défigurer et se désertifier à cause de
notre lâcheté et notre cupidité, en voyant les cœurs s'éloigner
et s'endurcir par la haine, l’ignorance et l'indifférence, en
voyant la pourriture de la corruption s'enfler, se dilater, jusqu'à
envahir toutes les sphères de notre société, les désordres de ce
monde nous embrouille le cœur et nous rend aveugles, nous pouvons
nous demander : où sommes nous ? Vers où allons nous? Que
cherchons nous finalement ?
Mais
frères et sœurs, cherchons le Seigneur ! Comme
Marie-Madeleine, comme Pierre et Jean, malgré la nuit obscure,
malgré notre tristesse, malgré nos chagrins et nos doutes, allons
en avant et cherchons le Seigneur, et nous découvrirons que le
tombeau est vide, et Notre-Seigneur est vivant comme Il l'avait
promis.
Oui,
Notre-Seigneur et notre Dieu est vraiment ressuscité. Saisons donc
la main du Ressuscité, et avec Lui, traversons ce monde qui passe et
allons vers Père de Miséricorde : tel est le chemin de notre
foi, le sens véritable de notre vie. Ne laissons pas notre foi
étouffer par les soucis de ce monde, et soyons sûrs de l'amour de
Dieu, le Dieu d'Amour, le Dieu de Jésus-Christ, l'unique vrai Dieu
ne se détourne jamais à un cœur qui s'ouvre à Lui, même dans la
nuit la plus obscure.
Je
voudrais terminer par ces quelques vers de saint Jean de la Croix,
tirés d'un poème intitulé « Chant de l'âme » :
« Je
sais bien la source qui coule et fuit, malgré la nuit.
« Cette
source éternelle est hors de vue, moi je sais bien là où est sa
venue, malgré la nuit.
« L'origine
n'en sais, car n'en a point, mais je sais que toute origine en vient,
malgré la nuit.
« Je
sais qu'il n'est nulle chose si belle, et que cieux et terre boivent
en elle, malgré la nuit. »
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