Abbe J-S

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dimanche 20 décembre 2015

Homélie pour le IVe dimanche l'Avant - 2015, l'Année C

Après avoir reçu l’Annonce de l’Ange, Marie, portant déjà en elle le germe du Messie, « se rendit avec l’empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée », pour visiter sa cousine Élisabeth, l’épouse de Zacharie ; la vieille femme appelée « stérile » se trouvant à ce jour-là à son sixième mois de grossesse.
« Cette épisode, dit le Pape Benoît XVI, n’est pas un simple geste de courtoisie, mais représente avec une grande simplicité la rencontre de l’Ancien avec le nouveau Testament. Les deux femmes, toutes deux enceintes, incarnent en effet l’attente et l’attendu. Élisabeth âgée symbolise Israël qui attend le Messie, tandis que la jeune Marie, porte en elle l’accomplissement de cette attente, au profit de toute l’humanité ». (Catéchèse du 23 décembre 2012)
Selon l’enseignement du saint Père, en Élisabeth s’incarne la première Alliance. Cette œuvre généreuse de Dieu était, à cette époque, considérée comme mourante et stérile. Cependant, la fécondité d’Élisabeth est aujourd’hui miraculeusement éveillée par l’Esprit-Saint : puisqu’en elle est conçu le plus grand des enfants de l’homme, le Précurseur, celui qui préparera la venue du Sauveur, celui qui désignera au sein de son peuple la présence du Messie. Cet inouï et inespéré renouveau dans l’histoire sainte nous fait comprendre la véritable vocation du peuple élu : par son Alliance avec le Très Haut, Israël est chargé de faire connaître au monde, plongé dans l’ignorance de la nuit par le péché, le nom de l’unique vrai Dieu, la clarté et la beauté de son visage, la tendresse de son amour miséricordieux. Cette vocation est la vitalité même de ce peuple choisi par Dieu entre toutes les nations. Sans aucun mérite de sa part, Dieu veut, par ce peuple, se révéler au monde entier.
Et pourtant, de génération en génération, malgré les efforts généreux et inlassables de nombreux Prophètes, Israël n’a pas su persévérer dans sa vocation. Et par la voix d’Isaïe, on entend le regret profond du cœur blessé de Dieu : « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël. Le plant qu’ il chérissait, ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici le crime ; il en attendait la justice, et voici les cris » (Is 5,7).
Mais au sein de la maison d’Israël, il y a ces quelques pauvres et insignifiants qui demeurent fidèles à l’Alliance sacrée, ils ne veulent pas que l’œuvre de Dieu se trouve en définitif abandon et ils supplient le Seigneur : « Dieu de l’univers reviens ! Du haut des cieux regarde et vois : visite cette vigne et protège-la, celle qu’a plantée ta main puissante. Que ta main soutienne ton protégé, le fils de l’homme qui te doit sa force. Jamais plus nous n’irons loin de toi : fais-nous vivre et invoquer ton nom ! » (Ps 79)
La conception de Jean le Baptiste par Élisabeth la « stérile », n’est-ce pas la réponse clémente de Dieu à l’humble et insistante prière de ses fidèles ? La vie d’Israël refleurit dans la naissance du dernier et le plus grand Prophète de la première Alliance, et sa vocation aboutit par cette voix qui acclamant : « Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ».
Et nous, mes chers frères et sœurs, nous sommes l’Église de Dieu, le peuple racheté par le sang du Christ, nous sommes l’Israël nouveau d’aujourd’hui, le peuple élu pour l’Alliance nouvelle, et nous avons la même vocation de faire connaître au monde le visage de l’unique vrai Dieu, le Dieu de Jésus-Christ, le Dieu de l’infinie miséricorde. Et la vie de l’Église ne peut trouver sa vigueur et sa fécondité qu’en recevant sans cesse sa vocation. Si notre Église est aujourd’hui vieillissante, si notre travail se trouve stérile, c’est peut-être parce que nous avons égaré en quelque sorte notre vocation. Mais en faisant rayonner la miséricorde de Dieu, en vivant la joie de l’Évangile, nous pouvons recevoir de Dieu un élan toujours nouveau.
Que le divin enfant de Bethléem qui va naître sème en nous un ardent désir évangélique, et que nous puissions, durant cette année sainte inaugurée par le Pape François, être tous des authentiques et courageux apôtres de la miséricorde de Dieu dans un monde assoiffé de l’amour et de la paix. Amen.





mardi 8 décembre 2015

La solennité de l'Immaculée Conception 2015

« Ecce ancilla Domini : fiat mihi secundum verbum tuum ; voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole. » C’est, nous le savons, avec le « fiat » de Marie, cette jeune fille humble et méconnue de Nazareth, que la lumière du salut perça l’obscurité du péché, et que l’histoire du genre humain entra dans une ère nouvelle.
Si aujourd’hui, Marie est vénérée par tous les chrétiens authentiques comme la « Porte du Ciel, Porta caeli », c’est bien parce qu’à ce jour-là, à cet instant-là, elle a été pour Dieu, par son consentement libre et total, la porte de ce monde, la porte par laquelle, le Créateur entra dans l’univers créé, en faisant siennes la pesanteur et la fragilité de notre chair.
En effet, depuis que le tentateur vola le « oui » d’Ève, la mère de tous les vivants, et souilla ainsi l’innocence de nos premiers parents, une porte close s’installa entre Dieu et l’humanité et les sépara. Cependant, l’amour incessant et inlassable du Créateur ne s’est point découragé ; ne voulant pas que le porteur de son image soit à jamais sujet de la corruption, alors il tint devant cette porte fermée, et il attendit.
Dans un passage du Cantique des Cantiques, Dieu fit entendre à son peuple le désir profond et ardent de son cœur par la voix de l’Époux : « Aperi mihi, soror mea, amica mea, columba mea, immaculata mea ; ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, mon immaculée. » (Ct 5,2)
Oui, comme un mendiant d’amour, Dieu veut que cette porte s’ouvre devant Lui, et qu’elle soit ouverte par la volonté de celle qui, ayant un cœur vraiment pur et une âme généreuse, sait accueillir l’impossible avec une liberté audacieuse et innocente, et Il l’appela déjà son « Immaculée ».
Et voilà, avec le « fiat » de Marie, avec le « oui » de l’Immaculée, le monde renaquit, la Miséricorde divine devint une réalité visible, puisqu’elle portera désormais un visage d’homme, et la terre entière s’éveilla en s’ouvrant aux merveilles du Ciel, et sur la blancheur de l’aurore, se dessina le renouveau de l’Alliance entre Dieu et son peuple.
Aujourd’hui nous célébrons la solennité de la Conception Immaculée de la très sainte Mère de Dieu, mais méditons davantage sur cet instant unique de toute l’histoire, méditons sur cet « oui » qui a été décisif non seulement pour elle-même, pour sa nation, mais aussi pour nous tous, en nous souvenant le « oui » que nous avons nous-mêmes prononcé un jour dans notre vie. 
Je pense à cet « oui » que j’ai dit devant l’évêque à Dieu et à toute son Église lors de mon ordination sacerdotale, il y a à peine quelques mois. Et vous, une grande partie d’entre vous aussi, un jour vous avez dit cet « oui » dans le sanctuaire de Dieu l’un à l’autre, et par ce mot si beau et si solennel, vous êtes devenus l’unique l’un pour l’autre et ensemble, unis par Dieu, vous êtes devenus « un », pour toujours.
Cependant, nous savons, vous comme moi, que combien sommes-nous fragiles et inconstants, et que le chemin que nous avons à arpenter est jalonné de dangers et de tentations. Mais n’oublions pas le « oui » de l’Immaculée, le « oui » qu’elle a prononcé ce jour-là à l’Ange de Dieu, pour l’humanité et pour chacune et chacun d’entre nous ; et c’est bien par cet « oui » qu’elle est devenue pour nous l’étoile du matin, l’étoile qui nous annonce le jour sans déclin et qui éclaire nos cœurs et nous conduit vers la finalité de notre pèlerinage, vers son divin Fils, Notre-Seigneur.
Oui, méditons le « oui » de Marie, gravons-le dans le plus profond de notre cœur, que la lumière de sa pureté dissipe les ténèbres de nos doutes, de nos peurs, et que nos « oui », si souvent timides et hésitants soient consolidés par le sien. Amen.